Les patients atteints d’un cancer ayant survécu à des traitements lourds et vaincu la maladie subissent souvent un énorme choc psychologique après coup et ont du mal à reprendre le fil de la vie. Le professeur Bart Neyns de la VUB a, en collaboration avec la professeur Anne Rogiers de la VUB, pris l’initiative de créer le Centre des survivants du cancer.
Anne Rogiers, professeur à la VUB, est chef du département de psychiatrie du CHU Brugmann. Depuis 10 ans, elle étudie la qualité de vie, les conséquences psychosociales et les problèmes neurocognitifs des patients qui ont été traités avec succès par immunothérapie. Par ailleurs, dans sa pratique clinique, elle traite également des patients en postcure d’autres formes de cancer et a fondé la clinique de remédiation neurocognitive au CHU Brugmann en 2018.
Bart Neyns, professeur à la VUB, est chef du département d’oncologie médicale de l’UZ Brussel. Il a été étroitement impliqué dans le développement de l’immunothérapie du cancer au cours des vingt dernières années et a traité de nombreux patients.
Bart Neyns : « Cela peut sembler paradoxal, mais dans cette expérience, j’ai remarqué que certains patients pour qui le traitement a connu une issue inespérée devaient faire face à de graves troubles psychologiques durant les deux premières années de leur ‘survie’. »
Afin de mieux comprendre ces problèmes et de fournir des soins appropriés, des recherches scientifiques ont été menées au sein de notre département par la professeur Anne Rogiers. Cette recherche a montré que le fait de devoir à nouveau envisager l’avenir après avoir connu une maladie mortelle, peut entraîner des problèmes psychologiques intenses chez certaines personnes, voire des pensées suicidaires.
Bart Neyns : « Ces patients sont à la fois sincèrement heureux de leur guérison, mais, en même temps, ils n’osent ou ne veulent pas aborder leurs problèmes psychologiques avec leur oncologue. »
Centre des survivants du cancer
Dans l’étude de la professeur Anne Rogiers, les patients qui ne présentaient pas de récidive un an au minimum après le début de l’immunothérapie ont été suivis afin de détecter d’éventuelles conséquences psychologiques et neurocognitives ainsi que l’impact possible sur leur qualité de vie. Cette étude a montré que les patients traités avec succès par immunothérapie luttent contre les symptômes de stress post-traumatique, la peur de la rechute, la fatigue et les troubles de la concentration et de la mémoire, qui ont un impact significatif sur la qualité de vie. Ces résultats ont été observés chez des patients récemment guéris, mais aussi chez environ la moitié des survivants à long terme, traités avec la première immunothérapie disponible. Ces résultats préliminaires ont été repris par des collègues de l’hôpital Antoni Van Leeuwenhoek d’Amsterdam. Nous étions le seul centre belge à participer à cette étude multicentrique sur la qualité de vie des survivants à long terme traités par immunothérapie. Les résultats de cette étude sont conformes à nos conclusions préliminaires selon lesquelles les survivants à long terme présentent davantage de problèmes cognitifs et psychosociaux par rapport à un groupe témoin en bonne santé.
Les recherches de la professeur Anne Rogiers ont également montré que les patients traités avec succès par immunothérapie avaient besoin d’une prise en charge multidisciplinaire personnalisée.
C’est dans ce contexte qu’a été fondé le Centre des survivants du cancer, où, dans une première phase, un suivi ciblé sera proposé aux patients qui ont été traités avec succès par immunothérapie. Un programme intégratif combinant remédiation neurocognitive, rééducation physique et accompagnement psychologique sera proposé en groupe, sous la direction de la professeur Anne Rogiers. Des recherches scientifiques seront menées sur l’efficacité de ce programme intégratif. En nous appuyant sur nos études pilotes, nous nous intéresserons également aux conséquences cognitives et psychosociales d’un traitement réussi par immunothérapie.
Dans une deuxième phase, cette démarche sera étendue à d’autres formes de cancer.
Au Centre des survivants du cancer, les patients sont ainsi guidés pour mieux comprendre les éventuelles conséquences tardives, physiques et émotionnelles, du traitement. En outre, une aide est proposée pour faire face aux émotions liées à une maladie mortelle et des exercices de mémoire et de concentration sont proposés. Les problèmes de mémoire et de concentration peuvent rendre le fonctionnement quotidien difficile et retarder, voire empêcher, le retour au travail. L’attention est également portée sur l’impact sur l’environnement immédiat, car les parents, les partenaires ou les enfants passent également par un processus d’adaptation qui peut nécessiter des soins appropriés.
Au sein du Centre des survivants du cancer, des travaux de recherche sont également menés par Elisabeth De Waele, professeur à la VUB, responsable de la nutrition clinique et de la diététique. Son groupe de recherche soutiendra les personnes dans le domaine des conseils nutritionnels et des besoins caloriques.
Les gens mangent-ils assez, trop ou trop peu par rapport à leurs besoins personnels et le rapport entre les graisses, les protéines et les sucres est-il optimal ? Ces conseils nutritionnels individuels sont fournis depuis un studio multimodal sous la forme de consultations vidéo, de sorte que les patients n’aient pas à se déplacer.
Le groupe autour de la professeur Nele Adriaenssens de la VUB, coordinatrice de la réadaptation oncologique au centre oncologique, donnera corps à la réadaptation physique des patients. Le studio multimodal peut également être utilisé pour la rééducation physique.
Il y a huit ans, la professeur Nele Adriaenssens a lancé un projet de réadaptation physique pour les personnes atteintes ou ayant été atteintes d’un cancer. Cette initiative s’est transformée en un programme de soutien et de suivi réussi à l’UZ Brussel, où quelque 250 patients par an peuvent suivre une cure de 12 semaines pendant et/ou après leur traitement.
Nele Adriaenssens : « Le concept consiste en une réhabilitation en groupe et en dehors de l’hôpital. Une réadaptation en groupe, car elle présente un avantage psychosocial important grâce au contact avec d’autres personnes qui ont vécu la même chose, à l’échange de trucs et astuces et au soutien mutuel. Nous avons également jugé important de ne pas le faire à l’hôpital, mais dans un lieu éloigné de la souffrance, dans un endroit où ils peuvent commencer un nouveau chapitre positif dans un cadre verdoyant. Nous avons trouvé en Just Move à Wemmel l’endroit idéal pour ce projet ».
Green Energy Park
Le Centre des survivants du cancer sera situé dans le Green Energy Park créé par la VUB et l’UZ Brussel en juillet 2019. Il s’agit d’un laboratoire d’expérimentation à grande échelle situé à Zellik, où des entreprises, des instituts de recherche, des gouvernements et des utilisateurs travaillent ensemble sur des solutions innovantes et durables aux défis sociétaux. La recherche y est axée sur trois domaines : la transition vers l’énergie et la mobilité vertes, les questions numériques et l’hôpital du futur.
Bart Neyns : « Les patients ne considèrent pas l’hôpital où ils ont reçu leur diagnostic et leur traitement comme l’endroit idéal pour construire leur avenir. C’est pourquoi nous voyons un avenir radieux pour le Centre des survivants du cancer dans le Green Energy Park. »